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25 mai 2018 5 25 /05 /mai /2018 18:59

Crépuscule à Koro-Toro - José Romero-Martinez
https://bit.ly/2sdGPrF
Octobre 1984. Le Commandant Ange Orsini est envoyé en mission en zone hostile tenue par les forces de Kadhafi. Dans le vol qui l'emmène au Tchad, il fait la rencontre de Noracha, attachée de direction à l’ambassade de France de N’Ddjaména. Les événements s’enchaînent et Orsini doit prendre rapidement la route, même si ses sentiments pour Noracha ont pris une tournure à laquelle il était loin de se douter.

Son activité d'agent est chargée de nombreux événements rocambolesques mettant en danger son intégrité physique morale et sentimentale
https://www.edilivre.com/crepuscule-a-koro-toro-jo...
 
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1 février 2011 2 01 /02 /février /2011 08:38

Les rebonds de ma vie m’ont conduits où je suis.

Face aux difficultés, jamais je n’ai fui.

Sans cesse je ressasse cette destinée.

Que de changements pendant toutes ces années !

 

Tout au long de ma vie, mon être s’est forgé,

Sur des opportunités mes choix ont portés.

De mon tracé social dois-je m’en orgueillir

Ou du pourrissement conjugal, le vomir.

 

Dans ma grande lassitude je m’enlisai,

A l’agonie du temps l’âme s’évaporait.

Au crépuscule de mes jours je l’ai croisée,

Sur son cœur généreux je me suis reposé.

 

Au terreau de mon être l’amour a germé

Par sa douceur de femme tant malmenée.

Osez entraver notre charmante union,

Qui de votre vie faites un pauvre lampion

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3 décembre 2010 5 03 /12 /décembre /2010 10:30

« Je n’en peux plus ! Je me traîne ! » Murmura Éléonore.

 

Son ventre très proéminant de femme enceinte a, à présent, des proportions énormes. Il ressemble à un superbe ballon de rugby, prêt à prendre l’envolée de la transformation. Eléonore, sa trentaine fleurissante, et son type latin aquitain, vient de sortir du cabinet de son gynécologue, le Docteur Ogino[1]. Elle marche péniblement vers sa demeure, l’âme soulagée de la certitude du parfait développement du bébé.

 

« Vous aurez un très beau garçon ! », lui a confirmé l’encaducé, « Mais son poids risque de poser quelque problème à l’accouchement », a-t-il rajouté.

 

Le pas lourd d’Éléonore est aussi affecté par sa position légèrement inclinée vers l’arrière afin de contrebalancer instinctivement le poids de l’enfant, et l’angoisse insidieuse d’un enfantement douloureux et difficile.

 

Ce sentiment, maintenant permanant, l’a poussée à faire part de ses craintes à son époux, Henry-Jean Pintor, peintre en bâtiment réputé pour sa dextérité à remuer le pinceau à la moindre occasion.

 

Éléonore insistante, a réussi à imposer sa volonté selon laquelle son ouvrier de mari devait être là au cours de l’accouchement, malgré l’interdiction de présence des époux pendant l’accouchement[2]. Elle se sent naïvement en sécurité dès qu’elle est présence de son copain avec qui elle partage autre chose que le pain !

 

Les premières contractions se manifestant, vient donc la nécessite de transporter rapidement la future parturiente à la maternité « La Cigogne » située à une quinzaine de kilomètres du domicile conjugal.

 

Les formalités administratives rapidement conclues, la future maman, accompagnée de son compagnon est guidée par l’infirmière de service. Elle est poussée vers la salle dite « de travail » où nul ne s’épuise si ce n’est « l’embarrassée[3] » !

 

Éléonore, subissant les douleurs des contractions arrivants par vagues de plus en plus déferlantes, et engluée dans une angoisse sourde de plus en plus visqueuse, est lestement équipée du fameux tablier blanc, curieusement ouvert dans la dos, ce qui bien entendu très pratique pour la circonstance[4].

 

Allongée sur le dos et sur la table gynécologique, ses yeux roulent d’un côté à l’autre, sautant sans arrêt du mari assez marri, à la Sage-Femme boutonneuse, et au Doc Gynéco Ogino.

 

C’est que c’est sa première partition dans la gamme de création de gamin !

 

L’encaducé d’origine bridée, se plante, jambes écartée, buste penché, œil inquisiteur devant le mont de venus généreusement dévoilé dans une impudeur biblique.

 

Éléonore, entre deux contractions, fripée par tant de douleur, ne peut s’empêcher de maugréer :

 

« Tu enfanteras dans la douleur, disait l’autre… !

Ce devraient être les hommes qui devraient accoucher !

Ces égoïstes vous engrossent et se retirent avec le plaisir !

Hé,… Henry-Jean, c’est fini, tu m’en feras plus de mouflet !!! »

 

Le peintre, penaud, tient fermement la main de sa Douceur pensant ainsi alléger la souffrance d’Éléonore qui a perdu le nord. Son esprit vibre au tempo haletant de la mise à la vie imminente.

 

« Poussez Madame, poussez ! » Ne cesse de répéter Doc Gynéco.

« Allez-y, poussez,…poussez », Répète la femme sage se croyant à Bayonne.

 

Le col de cette voie sacrée qu’est l’utérus, est dilaté à l’extrême.

 

Doc Gynéco ne peut s’empêcher de s’exclamer :

 

« Le col est aussi grand que celui du Somport !», Décrète extasié ce docte pisteur.

« Ca va être facile » Prévient l’inaugurateur[5] spécialiste du cordon ombilical.

 

Dans une longue expiration, compriment son ventre de ses muscles ventraux fatigués par l’effort soutenu, la parturiente éjecte brutalement son nouveau-né avec une telle vigueur que celui-ci se casse le nez sur le mur du fond, rendant ainsi son âme, pauvre être.

 

De dépit, l’encaducé rend son tablier, en vocifèrent :

 

« Mais qu’est-ce que c’est que cette primo parturiente qui éjecte les mouflets plus vite que les noyaux d’olive ?

C’est un gardien de but qu’il aurait fallu !!!»

 

La nouvelle maman, jambes écartées, secoué de sanglots, laisse l’émotion l’emporter dans un séisme de l’âme.

 

« Mon bébé, mon bébé !», hurle-t-elle.

 

La sage-femme, elle n’en mène pas large et en profite pour le prendre, le large.

 

Le père qui s’était évanoui depuis un bon moment revient à lui, se redresse lourdement, et prenant appui sur la table d’ustensiles sanitaire, aperçoit le bébé gisant quasiment à ses pieds dans une éclaboussure de sang, interroge abasourdi :

 

« Qu’est que c’est ?... Qu’est qu’il y a ?...Qu’est qui s’est passé ? »

 

« Le bébé est mort. Il est sorti si vite qu’il m’a échappé. Révèle Doc Gynéco.

 

Depuis cet horrible accident, neuf mois sont passé.

Henry-Jean est parvenu à calmer, quelque peu, la douleur de son épouse en faisant la seule chose qu’il savait faire parfaitement, remuer le pinceau.

Éléonore se retrouve à nouveau enceinte, et sur le point d’accoucher dans la même maternité, avec la même équipe de mauvais délivreurs.

 

Mais le peintre, échaudé sait à quoi s’en tenir.

Il se tient donc, campé solidement sur ses deux jambes, face à sa femme en position de parturiente, dans la position du gardien de buts.

 

« Pousse ma Chérie… ; pousse ! » dit-il, en encourageant sa partenaire de jeux érotiques.

 

« Poussez,…poussez ! », Répètent en cœur les deux membres de l’académie.

 

Dans une longue expiration, compriment son ventre de ses muscles ventraux fatigués par l’effort soutenu, la parturiente éjecte brutalement son nouveau-né avec une telle vigueur que celui-ci se casse le nez sur le mur du fond, rendant ainsi son âme, pauvre être. (de nuevo joder[6]!)

 

Ce second bébé a giclé encore plus rapidement que le premier. Il est passé entre les bras du papa qui en reste pétrifié et la bouche bée

.

Il est vrai que, selon la vielle chanson des parturientes, « lorsqu’on a eu un premier enfants, les autres passent aussi rapidement qu’une lettre à la Poste ! ».

 

L’encaducé incrédule et se grattant férocement la tête garnie de quelques cheveux en bataille, s’exclame dépité:

 

« Mais qu’est-ce que c’est que cette nana qui expulse les mouflets plus vite que les sans-abris d’un squat ?

C’est Lev Ivanovitch Yachine [7] qu’il aurait fallu !!!»

 

La nouvelle, nouvelle maman, jambes écartées, secoué de sanglots, laisse l’émotion l’emporter dans un séisme de l’âme.

 

« Mon bébé, mon bébé !», hurle-t-elle à nouveau.

 

La sage-femme, elle s’est retirée plus vite que la marée basse en rade du Mont Saint Michel, laissant les uns et les autres égoutter leur chagrin sur le plateau technique.

 

Le père sortant de sa torpeur, se redresse vivement, aperçoit le bébé gisant quasiment à ses pieds dans une éclaboussure de sang, s’exclame, la rage contenue :

 

« Bor.el de mer.e[8] !!!, je vais le faire venir cet Ivan aux choses !

La prochaine fois, mon Éléonore, je te promets que le bébé ne passera pas[9] !!! »

 

Depuis cet horrible accident, neuf mois se sont écoulés.

Henry-Jean est parvenu à calmer, quelque peu, la douleur de son épouse en faisant la seule chose qu’il savait faire parfaitement, remuer à nouveau le pinceau.

Éléonore se retrouve encore enceinte, et sur le point d’accoucher dans la même maternité, avec la même équipe de mauvais livreurs.

 

Mais le peintre, échaudé sait à présent quelle conduite tenir.

Il a téléphoné, sur la ligne rouge, à Lev Ivanovitch Yachine, lequel sensible à la courbe de la natalité occidentale, s’est laissé finalement fléchir.

se tient donc, campé solidement sur ses deux jambes légèrement fléchies, face à sa femme à la partition imminente, dans la position du gardien de buts qu’il affecte particulièrement.

 

 « Pousse Éléonore… ; pousse, …pouuussse ! », hurle l’époux aficionado des maternités.

 

« Poussez Madame,…poussez ! », surenchérissent le duo d’encaducés.

 

« Allez-y Madame,…allez-y! » claironne le gardien de but en se mouchant d’un revers de manche, et en se grattant les génitales de l’autre main.

 

Dans une longue expiration, compriment son ventre de ses muscles ventraux fatigués par l’effort soutenu, pour la troisième fois, la parturiente éjecte brutalement son nouveau-né droit vers Ivanovitch.

Celui-ci le bloque sur la poitrine.

Dans un réflexe de footeux, drible et dégage vers l’avant.

 

Shooté contre le mur avec une telle vigueur, celui-ci s’écrase contre le mur du fond, rendant ainsi son âme a son créateur.

 

 

 

 



[1] Le Docteur Ogino, originaire de l’Empire du Soleil, éclairait les Dames par sa méthode originale consistant à déterminer l’heure précise de l’ovulation en fonction de la température corporelle. Cette méthode très utilisée dans les années 70, avant la légalisation de l’IVG, par les couples qui ne souhaitaient pas employer de contraceptifs du type chambre à air, a accentué le phénomène du « babi boum ». Merci Ho Gino !

[2] A l’époque, la présence du conjoint n’était pas encore usitée.

[3] Barbarisme sciemment employé par référence à la femme enceinte espagnole déclarée comme « embarazada ».

[4] Ne souriez pas, je suis certain que vous avez revêtu cet uniforme du parfait petit malade hospitalier !

[5] Oui, à force de couper les cordons, les gynécos sont passés Maîtres en inauguration !

[6] A nouveau bor.el ! (Remplacer le point par la 4° lettre de l’alphabet).

[7] Gardien de but soviétique né le 22 octobre 1929 à Moscou. Mort le 21 mars 1990 à Moscou.il évoluait au poste de gardien de but et était considéré comme le meilleur joueur ayant jamais évolué à ce poste

[8] Vous estes maintenant habitués. Remplacer le point par un « d ».

[9] Henry-Jean faisait sans doute référence, d’une part aux troupes républicaines espagnoles, et d’autre part aux gardiennes du temple du combat contre l’IVG.

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1 novembre 2010 1 01 /11 /novembre /2010 07:04

Que la personne qui n’ai jamais feuilleté de bandes dessinées, dites BD, se lève !

 

Bon, j’en vois une tassée devant son ordinateur, qui secoue négativement son chef.

 

-       Vous n’avez donc jamais lu de BD ? je demande éberlué !

-       Non ! me réponds-t ‘elle. C’est trop difficile ! Je ne feuillette que des « mangas » !

-       Il est vrais que dans les mangas il y a des bulles, mais pas trop ! Ça pourrait monter au cerveau !

 

Fondé donc sur la certitude que la population planétaire comprise entre 7 et 77 ans, assidument s’adonne assurément au 8°art, je vais tester vos connaissances où le graphique l’emporte sur l’épistolaire.

 

-       Que fait donc le coq dans une BD française ?

-       Cocorico ! bien entendu !

 

-       Que fait le coq espagnol ?

-       Vous ne le savez pas ? He bien il fait Cicirici ! (prononcer quiquiriqui)

 

-       Et le coq japonais ?

-       Cucurucu ! voyons !

 

-       Et le coq mexicain alors ?

-       Ha ha !!!, vous ne savez pas !

 

He bien il fait :

-       Coucouroucoucou…paloma…coucouroucoucoouuu…https://itunes.apple.com/fr/album/la-paloma/419478661?i=419478820 

 

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21 octobre 2010 4 21 /10 /octobre /2010 06:59

La savane est assoupie dans cette somnolence que distille le soleil tropical. Le silence carnassier de cette fin de journée n’est troublé que par les feulements lointains des grands fauves en mal d’amour.

Là-bas, à l’horizon, les montagnes noires se détachent sur le ciel étrangement bleu et vibrant de chaleur.

 

Un bruissement léger, pas loin. Un crotale progresse rapidement en imprimant des « Z » sur l’herbe agonisante. Il cherche le peu d’ombre salvatrice qui lui accordera un peu de fraîcheur dans cette nature sauvage.

 

Un peu plus loin, entre quelques arbres rabougris, une petite mare sert d’abreuvoir au peuple de la brousse. Tout autour, l’énorme quantité de bouses dénote une fréquentation assidue. Les bords de la grande flaque d’eau, piétinés par les nombreuses pates se sont transformés en masse boueuse séchant et craquelant sous la chaleur.

 

Un lion, un grand mâle, est justement en train de se désaltérer à grandes lampées de liquide brunâtre. Il est le roi de la jungle, et à ce titre, les autres animaux, déférents, diffèrent leur étanchement. Tel un gros matou, tête penchée et arrière train pointé vers le ciel, il boit et lape en faisant de sa gorge se bruit de minet devant son écuelle de lait.

 

Mais voilà que Gino, le gorille chez de clan ayant aussi la glotte asséchée se dirige vers l’abreuvoir. Il aperçoit Léo, la croupe généreuse pointant vers lui. Gino espiègle et très porté sur la chose sexuelle ne peut résister à l’envie de sodomiser son Seigneur.

 

-       Il doit avoir un anneau très mâle se dit-il.

 

Très précautionneusement le bouffeur de bananes progresse lentement pour se positionner précisément près du fessier de Sa majesté.

 

Et vlan !

 

Après une introduction rapide mais puissante, et quelques brefs allers et retours dans le bassin de Sa Seigneurie, Gino se carapate à, quatre pattes, pour se terrer dans le village pas loin, pensant éviter l’ire de Son Altesse.

Léo réagit tardivement.

 

-       Aïe,…mais qu’est-ce que… !

 

Se rendant compte du crime de baise-majesté que son auguste personne vient de subir, apercevant l’auteur de l’outrage déguerpir au loin, une immense colère le secoue jusqu’au très fondement.

 

Il rugit sa rage, les naseaux froncés, la bave dégoulinant entre ses énormes canines.

-       Je vais le tuer ! Je vais sculpter son corps avec mes griffes !

 

Il s’élance, crinière de feux faseillant au vent de sa course, comme l’étendard de la victoire d’Arcole.

Gino est déjà rentré dans le village aux quelques huttes de terre cuite et recuite par les dards de ra. Il s’est réfugié dans le bar où une paire d’habitués sifflent leur énième « Gala [1]».

 

-       Je vais faire semblant de lire le journal. Il ne pourra pas me soupçonner ce trou du cul !

 

Le sodomiseur s’installe nonchalamment à l’une des tables du fond, déploie le journal et attend inquiet la colère royale.

 

Léo se doute que son violeur s’est réfugié dans le bistroquet de brousse.

Il pénètre en trombe dans la tôle, et s’adressant au consommateur lisant le journal l’apostrophe.

 

-       Et toi,   au fond !, as-tu vu un gorille ?

-       Lequel ? répond Gino d’une voix chevrotante chargée d’inquiétude. Celui qui a niqué un lion ?

-       Merde !, maugrée Léo dépité. C’est déjà dans le journal !!!



[1] Bière africaine qui a la même odeur, la même température et le même goût que la pisse d’âne !

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12 septembre 2010 7 12 /09 /septembre /2010 18:26

Dans le haut Béarn, la vallée d’Ossau[1] est l’une de celles qui ont le plus marqué l’histoire et la culture de la région. Tracée par le Gave d’Ossau[2], puis le gave de Brousset, elle s’enfonce profondément jusqu’à la frontière ibérique marquée par le col du Pourtalet et les quelques « ventas [3]» agonisantes.

 

Dans cette vallée majestueuse, verdoyante et typique, le petit village de Louvie-Juzon, surveille l’accès à la plaine de Bielle et du verrou de Laruns. En cette journée de la mi-août, se trouve la petite place du village bordée par les boutiques du boulanger du charcutier et du petit troquet où sévit éternellement la chétive mais ho combien alerte propriétaire, Irène[4], à la silhouette canonique. Le village est encore dans sa torpeur d’un après-midi lourd et humide qui se dandine d’incertitude entre l’orage et la tempête de beau temps.

 

Perpendiculaire à l’espace de vie et commercial que représente la placette au centre de laquelle trois platanes maladifs écaillent leurs écorces, une rue conduit aux rives du Gave. Une petite digue tente de contenir ses eaux caractérielles. Là plusieurs bancs, judicieusement placés, offrent leur assise aux passants, las des querelles de cour[5], tentés par la fraîcheur ombrée des saules pleureurs.

 

Assise[6] précautionneusement sur l’un d’eux, une vielle dame au visage marqué par les « ravages du temps[7]» mais aussi par le soleil cuisant des journées agricoles, se remémore sa longue vie de labeur, de peines et de joies fugaces.

Ses souvenirs papillonnent et butinent aux calices de ces fleurs d’existence qui ont laissées leurs empreintes maintenant volatiles[8].

 

« Quatre-vingt-sept ans ! » chuchote Nathalie presque surprise de cette banale constatation. De ses doigts noueux déformés par l’arthrose, elle remue légèrement le léger bâton qui lui sert de canne comme si elle remuait ainsi ses souvenirs. Le passé lui envahi l’esprit. L’image de son Grand Amour qu’elle n’a jamais pu épouser fait naître une petite larme nostalgique. Jeannot engagé à rejoindre le Contingent à Sétif, en Algérie, en 1961 n’a pas pu honorer celui qui le liait par la promesse faite à la belle Nathalie de l’épouser après les moissons.

 

Son attention, pourtant distraite par ses émotions, est attirée par la silhouette tassée et chancelante qui avance péniblement vers elle a peu de distance.

 

« C’est Jeannot !» soupire-t-elle.

« Le pauvre avec cette atmosphère si lourde, sa blessure reçue dans la hanche et dans le Rif par une balle rebelle, doit le faire souffrir ! ».

 

En effet, Jeannot progresse difficilement avec la ferme volonté de s’assoir aux côtés de sa Nathalie, lui qui n’a jamais pu se coucher officiellement à son côté.

 

Il progresse en plantant sereinement son bâton de marche, poli et patiné par l’usage de ce paysan usé par le temps.

 

Il progresse.

 

A quelques pas de Nathalie, celle-ci s’exclame d’une voix chevrotante chargée d’affection et de nostalgie.

«  Haaa…, mon vieux complice ! ».

 

Jeannot quelque peu surpris de celle révélation déroutante, avoue lui aussi :

« Haaa…, et mes couilles aussi ! »



[1] En 1127, la vallée a est appelée valis ursaliensis, littéralement la vallée de l'ours, puis Orsal et enfin Ossau. Deux théories s'opposent concernant l'origine du nom Ossau. L'une tend vers le nom de rivière pyrénéen Ourse, ou Ousse. L'autre tend vers l'animal Oso en espagnol

[2] L’Ossau trop bucolique me gave !

[3] Venta est un nom commun espagnol désignant l’endroit où l’on vend. De nombreuses générations de gogos, attirés par le folklore, l’alcool et le tabac bon marché ont directement participé à la rapide éclosion de ses points de vente où l’hygiène et la qualité passaient abyssalement après le profit.

[4] Cette noble Dame fait partie des murs, construits au moment de la trahison de Bazaine à Sedan.

[5] Relisez si vous n’avez pas pigé l’astuce.

[6] Le texte a tendance à dériver dans le domaine législatif, ce qui me parait cohérent vu que la loi dérive.

[7] Expression consacrée par le poétologue Prosper Périmé !

[8] Note de l’éditeur : Cette phrase dénote l’impressionnante maîtrise littéraire de l’auteur. Il a déjà son siège chez les « Immortels » !

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6 mars 2010 6 06 /03 /mars /2010 11:23

Mes très chers lecteurs, j’ai voulu cet article quelque peu documenté et saupoudré de brins d’humour. Vous pourriez observe que cet article est décousu. Il l’est en effet. Je n’ai pas trouvé le fil adéquat pour recoudre la trame.

Toute ressemblance avec un personnage connu est purement réelle et n’est pas une coïncidence engendré par une imagination fertile.


1967 :

 Début mai, après m’être rendu compte de l’inefficacité de mes études, je décide de résilier mon sursis d’étudiant. En septembre j’aurais 22 ans et je suis majeur depuis plus d’un an. Mi juin, le Ministère de la défense a la bonté de me signifier que je suis « appelé sous les drapeaux », et afin de me rendre à mon Régiment, m’octroie un bon de transport gratuit. Je suis donc un « appelé du contingent»,  « incorporé » au 153° Régiment d’Infanterie (153° RI) à Mutzig, dans la tranche d’incorporation 2A. Comme je ne suis pas un connaisseur de bières, je m’imagine être affecté dans un Régiment en Allemagne, Mutzig ayant une étrange ressemblance avec le Dantzig de 1936. Et bien non, après quelques jours de recherche sur les différentes cartes teutonnes, l’idée me vient de compulser le fameux dictionnaire « Larousse », édition illustrée de 1965, où je découvre que Mutzig est une charmante petite ville d’Alsace sertie dans son écrin de houblons. Je pars, le 1er juillet, de Toulouse Matabiau à 23H 18, pour rejoindre Strasbourg le 2, en début d’après-midi, via Nîmes et Lyon. Arrêt de 20 minutes à Nîmes, au petit matin. Le remplacement de la locomotive électrique par une autre à vapeur, me laisse perplexe, le front chargé d’une série de points d’interrogation. Bien que le train soit « rapide », il a du mal à tracter la rame et crache furieusement des jets haletants de vapeur. Ce train a l’allure d’un « omnibus » plutôt que d’un « Express ». La chaleur de l’été et le chahut  constant  des soubresauts du wagon, aux passages des jointures des rails, m’empêchent de sommeiller assis sur ma banquette de seconde classe. Ma voiture n’est pas loin de la locomotive, et par la fenêtre baissée, de la fumée âcre et quelques particules de charbon emplissent mes poumons et agressent mes yeux. La traversée de la vallée du Rhône est interminable. « Lyon Perrache, 12 minutes d’arrêt » clame plusieurs fois la perruche de service.  Quelque temps après nous faisons halte à Lons-le Saunier, puis à Besançon et ensuite à Belfort où je suis dépité de ne pouvoir admirer sa légendaire trouée. La plaine d’Alsace est là, et vers 14H me voilà arrivé en gare Kleber à Strasbourg. Je suis totalement dépaysé. A la descente sur le quai, je me renseigne au premier contrôleur afin de connaître les horaires de correspondance pour Mutzig. J’ai quelque difficulté à comprendre son « français » tant il est, il me semble, teinté d’accent germanique. Je prends finalement ma  « Micheline » pour ma destination finale. A mon arrivée, vers 16H,  je découvre un gros bourg. C’est l’été. Il fait chaud. Le ciel est limpide et a cette couleur pâle et un peu lactescente des après-midis moites. Mutzig étant l’un des sites réputés pour leur bière, je n’hésite pas à découvrir la saveur de ma première « amer-bière » à l’un des bars-restaurants de l’agglomération, dans lequel je compte passer la nuit avant de me faire « incorporer » le lendemain matin. Dans cette garnison, j’y effectuerai deux mois de « classes » au sein de la 11° Compagnie.

Mes premières impressions de « Bleu Bitte » sont liées :

·         A l’horrible vision des crânes tondus sans discernement par des « anciens » qui prennent un malin plaisir à nous « bahuter »,

·         A l’acquisition d’un « paquetage », et au port de vêtements usés par quelques générations d’HDR. Bien qu’ils soient à ma pointure, les brodequins usés par d’autres pieds, me font passablement souffrir.

·         A la vision, puis au port de guêtres qui me semblent sorties des magasins de l’Intendance du second empire.

Mes journées sont rythmées par l’instruction de base FETA, et mes nuits sont perturbées par les délires d’un « petit camarade » somnambule. La « bouffe » préparée, à tour de rôle,  par l’une des trois sections à l’instruction, est immonde. Je suis à la fête avec la FETA où les exercices « FOMEC » sont censés m’en faire devenir un,… de mec.

Au cours du deuxième mois de formation, un Sergent me convoque, ainsi qu’un clerc de notaire et un instituteur et me fait part de la décision du Capitaine, de nous faire participer aux tests psychotechniques de sélection des candidats volontaires au Peloton préparatoire aux Officiers appelés. En effet mon « N.G », Niveau de culture Générale, attribué par la fonction militaire lors des tests d’incorporation, est de 18/20, alors que la moyenne des appelés dans la compagnie d’instruction est de 8/20. J’avais donc l’aura du parfait instruit, ce qui expliquait l’attitude révérencieuse du galonné. Je suppute que le port d’un galon d’officier, même appelé, confère quelques avantages, en particulier ceux d’accéder à de bons repas et de pouvoir dormir dans un bon lit aux draps sans couture médiane. Je suis donc volontaire pour le peloton préparatoire à la formation des élèves Officiers.

Début septembre, à Commercy, je passe les tests d’aptitude à la formation des élèves Officiers. Pour cela, j’intègre le peloton d’élèves gradés du 164° Régiment d’Infanterie , à la caserne Niel de Verdun, en vue de la préparation au stage d’Officier de Réserve de l’Ecole Spéciale Militaire de Saint-Cyr Coëtquidan. Après deux mois de formation, j’obtiens le grade de caporal, et je fume comme un pompier du même grade. N’oubliez pas que les cigarettes « Caporal » émanaient de notre gauloise de SEITA. Fumant des « Troupes », je conserve donc mon statut d’Homme Du Rang, (HDR).

Début octobre, j’intègre le peloton d’Officier de Réserve de Coëtquidan ( Ecole Militaire de Saint-Cyr) promotion « De Turenne ». Fermez le Ban !

Tara tat, tara tata, tonton rata Tata…

L’un dans l’autre, comme disait ma Tante à mon Oncle, il vaut mieux être gradé que dégradé !

 

1968 :

Début février, après quatre mois de stage intense au Peloton EOR de Coëtquidan, je suis promu au grade d’aspirant pour servir en tant que chef de Section Commando. Ma formation de Chef de section m’a conféré, à défaut de médaille, toutes les armes pour être le meneur d’hommes au combat, objet de ma pérégrination à travers les landes brumeuses bretonnes…Brrr ! Je suis affecté au 8° Régiment d’infanterie Motorisée de Landau en Allemagne. Au sein de la 11° Compagnie,  j’ai en charge l’instruction FETA,  des appelés. Mon enthousiasme et mon sens pédagogique sont, paraît-il, remarqués et induisent une affectation à une prestigieuse compagnie d’instruction, la 12°.  Là, j’instruis les futurs Caporaux-chefs et Sergents appelés, une quinzaine par classe d’âge. L’apprentissage du commandement, l’acquisition du sens du terrain par l’usage d’une cartographie maîtrisée, les raids, les nombreuses marches tactiques, et les exercices de combat que je leur prodigue généreusement, sont les matières qui les rendent aptes au commandement du groupe de combat. Cette période de ma juvénile activité militaire a particulièrement renforcé mes qualités de Tireur d’élite et de sportif. Le Colonel Déchards, chef de Corps me désigne, tout naturellement comme responsable des Équipes Régimentaires, de tir et de cross country. Je n’ai pas tiré au flanc, et mes « run », à travers le Palatinat, à la tête des « Bêtes de course », ont fait honneur au 8°RIM.

Entre temps, le mois de mai passe par là, et la grève estudiantine initiée à la Sorbonne, dégénère en une « chienlit » digne de notre République incertaine. Daniel Cohn-Bendit et ses potes, Alain Geismar et Jacques Sauvageot, sont les moteurs du mouvement. « Il est interdit d’interdire ». La France est paralysée, tout comme l’Elysée. L’insurrection gagne. Le pays est au bord du gouffre, et un pas de plus nous précipiterait dans l’abîme. Le 8°RIM est en état d’alerte, et prêt à intervenir à Paris pour rétablir l’ordre. Le Grand Charles prend son hélico, Alouette 3, et va rendre visite à son copain Massu Commandant des Forces Françaises en Allemagne afin de s’assurer que son miroir n’est pas un leurre. La paranoïa, habilement orchestrée, gagne la France qui s’attend au sabotage et à la destruction de nombreux points sensibles nationaux, régionaux ou locaux.  Toutes les forces de sécurité, Armée, Gendarmerie, protègent et surveillent, soit un centre de télécommunication, soit un centre de décision, soit un sujet de dérision. Même le 126° RI de Brive la Gaillarde, spécialisé en actions de DOT se voit attribuer la défense du énième Centre Mobilisateur. Les aéroclubs sont barricadés. Celui de Saint Girons, « Antichan », qui ne possède qu’une piste en herbe de 625,33 mètres est étroitement surveillé. Des obstacles antichars sont judicieusement disposés pour indisposer un quelconque pilote de Nord Atlas 2501. La cohérence est maintenue, les obstacles antichars ne peuvent fleurir qu’à Antichan.

Dans le pays, la pénurie d’essence paralyse les mouvements, tout comme la grève générale celle de l’économie.

Qui, dans ce gigantesque bras de force, pense avoir gagné ? La solution sera donnée dans le prochain article intitulé « Tiens voilà du badin !»

Début novembre je suis promu au grade de Sous-lieutenant de réserve sous contrat ORSA (Officier de Réserve en Situation d’Activité), et je suis un stage de commando spécial, spécialisé dans la spécialisation des spécialistes. La spécificité de cette spécialité est spécialement spécifiée dans les spécifications !

 

1969- 1971 :

 Je n’envisage pas d’entretenir mon statut d’ORSA éternellement, lequel est reconduit par contrats de deux mois en deux mois, puis de six en six.

Aussi, poussé par un Lieutenant ancien, le Lieutenant Play, qui se plaid sans cesse à me rabâcher que je « dois rentrer dans l’Armée par la grande porte », je décide de préparer le concours des Officiers d’Active afin de  pousser celle de la prestigieuse École Militaire Interarmes (EMIA) de Coëtquidan. La préparation au concours, de niveau Terminale, doit dans mon cas, se faire à l’École Militaire de Strasbourg. La scolarité, obligatoirement interne est calquée sur celle des Lycées.

Pour intégrer l’École de Strasbourg, je dois contracter un engagement comme Sous-officier auprès de l’Intendance de Landau. En signant le contrat, je démissionne par obligation, de mon grade de Sous-lieutenant. Je me retrouve Sergent, avec la solde et l’ancienneté afférente. Quelques semaines après, je me retrouve interne, avec le statut d’un Sous-soldat corvéable à merci. Le moral est bon. La « bouffe » moins.

Un an plus tard, épreuves du concours passées, je me retrouve également interne à la 3° Brigade, 3° Section de l’EMIA, toujours considéré comme un Sous-Soldat, mais de 1° classe.

L’année scolaire écoulée, « l’amphi » de classement intervient, et comme j’ai le bonheur de me trouver dans le premier tiers du classement général. Lorsque mon tour arrive de me présenter au Général Commandant les Écoles, je choisis l’Arme des transmissions avec option ALAT, option qui aura par la suite une importance capitale.

Donc après avoir passé de nombreuses heures à somnoler lors des cours insipides donnés au fameux amphi « Napoléon », me voilà Sous-lieutenant d’active, avec mes belles barrettes toutes neuves sur mes épaules ! Il est vrai que les barrettes d’active reluisent plus que celles de réserve, j’en fais l’expérience. Je pars rejoindre l’École d’Application des Transmissions à Montargis.

Encore un an d’école, mais externe. Quel bonheur d’être presque considéré comme un cadre. L’enseignement militaire est assez minable. Les cours techniques prodiguant un enseignement des transmissions saupoudre nos cervelles de guerriers de vagues connaissances nous permettant de maîtriser l’emploi de matériels passablement obsolètes toujours employés dans nos forces. Cela est particulièrement vrai pour le cours « radio » où nous apprenons la mise en station de l’ANGRC9, ou pendant le cours « Fil », la mise en œuvre de lignes téléphoniques spécialisées.

Montargis est une  très belle petite ville du Loiret. Mais, je ne suis pas particulièrement appliqué à suivre mon année « d’application ». Nous sommes une quinzaine d’Officiers à être affectés dans les différents organismes de transmissions, les plus brillants dans les Compagnies divisionnaires, d’autres dans les Régiments de Corps d’Armée. Moi, je dois rejoindre le 40° Régiment de Transmissions, Régiment de la 1°Armée, rien que çà,  stationné à Neustadt dans le Palatinat. Je vais faire partie des fameux FFA.

 

1972- 1973 :

Dimanche 30 juillet, avec mes deux grandes cantines je débarque en gare de Neustadt an der Weinstraße Allemagne. A mon arrivée au Mess des officiers, un très sympathique Sergent-chef s’étonne de me venue :

« Mais, mon Lieutenant que faites-vous ici ? Le Régiment déménage à Sarrebourg ! »

En fait, le 40° RT restera encore une paire d’année dans le Palatinat.

Le lendemain, je me présente à mon Chef de Corps, le Colonel Junca. Je suis affecté à la compagnie d’exploitation. Le Régiment en comporte 2, la mienne, la CE, et la Compagnie de Faisceaux Hertziens, FH. Quelle n’est pas ma surprise, lorsque mon nouveau capitaine, Schneider, m’affecte à la Section Fil et Énergie, en remplacement du Lieutenant Leroy muté au 41°RT pour d’obscures raisons !

J’hérite de deux gros semi-remorques, d’une quarantaine de GBC8KT, de six groupes électrogènes de 20 et 40 KVa, de deux dérouleuses de câbles sur camionnette, d’une centaine de kilomètres de câbles allant de la paire à la multi-paire, d’une ribambelle de postes téléphoniques EE8 ou a cadran,…etc., etc.

Je dois gérer :

·         Les conflits permanents de mes cinq Sergent-chef, tous de la même ancienneté, qui souhaitent, tous, être Vizir à la place du Calife,

·         Ma quarantaine de soldats, dont les plus turbulents sont ceux de l’équipe « montage ligne » qui carburent au litre de rouge par kilomètre.

Le 40°RT, fournit et met en œuvre  de moyens de transmissions nécessaires au commandement de la 1° Armée, et comme la France en possède une seule, il n’y a donc qu’un seul régiment de ce niveau. On y trouve des matériels assez hétéroclites, comme deux semi-remorques équipés en centraux téléphoniques, et des groupes électrogènes de 20 et 40Kva. Ces équipements font partie des réquisitions auprès de la Wehrmacht, l’Armée allemande. Un quart des personnels employés dans le Régiment est Civil sous contrat, ce qui pose d’énormes difficultés pour son déploiement hors garnison !

Bien évidemment, comme tout Sous-lieutenant arrivant dans son premier corps, je suis volontaire désigné pour subir l’instruction spécialisée dans les domaines variés, et permettant au Régiment de rendre- compte à l’échelon supérieur de sa capacité à :

·         La lutte anti-aérienne. J’effectue le stage à Bitbourg,

·         Transporter les Trains de Combat par voie ferrée, ce qui est tout a fait cohérent pour ces rames. Stage d’Officier d’embarquement suivi à Baden-Baden !

Les mois passent, et finalement le régiment déménage, en deux étapes, à Sarrebourg, Grand bourg en limite Est de la Lorraine. Ma Section est bien entendu la dernière à rejoindre la nouvelle garnison.

Entre temps, je suis nommé Lieutenant, car très souvent je tiens lieu de Capitaine.

 

1974 :

Mon Colonel reçoit un appel téléphonique de Villacoublay, base mythique de l’Armée de l’Air qui abrite également le « COMALAT », le commandement de l’Aviation Légère de l’Armée de Terre. Le COMALAT s’enquiert de la validité de mon volontariat exprimé lors de l’amphi de  sortie de l’EMIA. Souvenez-vous, je vous l’ai narré au paragraphe 22, article épuisé. Suivez donc, je sais que celui-ci est quelque peu soporifique. Ne protestez pas, j’ai vu l’avachissement de vos lourdes paupières plombées par la douce Morphée qui vous enveloppe de ses beaux bras !

Je confirme donc ma pleine adhésion à la formation d’Officier Observateur Pilote Hélicoptère.

Mes bons camarades me taquinent en prédisant que je serai muté au GALCA1 de Phalsbourg à 20 kilomètres.

Le COM TRANS du Corps d’Armée me laisse entendre que mon départ de l’Arme des Transmissions entraînera des conséquences fâcheuses pour le bon déroulement de ma carrière.

Ils ont eu raison ! L’avenir me l’a démontré.

 

1975:

 Me voilà en stage, pour une période de plus de 9 mois, à l’École de Spécialisation de L’ALAT, ESALAT. Il s’agit du 2 OPH75. Il me faut cueillir tous les brevets de pilotage, en campagne, en montagne, en vol de nuit,…pour obtenir enfin le droit d’arborer fièrement sur la poitrine du côté droit de la « vareuse » l’insigne du Brevet d’Observateur Pilote d’Hélicoptère, N° 1039.

J’ai 30 ans.

Je suis muté au  GALCA1 de Phalsbourg !

 

1976- 1981:

Mes qualifications d’Observateur Pilote d’Hélicoptère, de chef de Patrouille Hélico, et mon appartenance à l’Arme des transmissions, influent grandement sur la décision d’affectation de mon nouveau Colonel, le Colonel LARTIGUE. Il confirme celle du COMALAT, et me prie de prendre les consignes auprès de l’actuel Off-Trans en instance de mutation dans une garnison ensoleillée du Sud-est, Le Luc en Provence.

 

Ma première moitié du séjour à Phalsbourg est marquée par une intense activité dans le domaine de gestion et de la mise en œuvre des transmissions de l’ALAT du Corps d’Armée, GALCA1 et GHL de Nancy. Responsable de la rédaction des Ordres Complémentaires des Transmissions, découlant des Ordres de Base pour les Transmissions, je dois harmoniser et faire fonctionner les réseaux téléphoniques et radioélectriques, air, air-sol, sol, utilisant des fréquences HF, VHF, UHF en MA ou FM, alors que de nombreux moyens d’ancienne génération sont encore à lampe et à cristallisation par quartz. Ainsi, lors des manœuvres d’envergure de type « Meuse » ou « Marne », ma responsabilité couvre le bon fonctionnement de très nombreux matériels et équipements comme :

·         300 Emetteurs-Récepteurs embarqués sur les hélicoptères, fonctionnant sur une trentaine de réseaux,

·         Deux PUMAS SA 330 PC, équipés de leurs moyens de Commandement et de Transmissions,

·         D’une Gazelle SA341 PC, équipée de 2 TRVP 213,

·         Deux radars tactiques, SPARTIATE, de surveillance et de recueil des aéronefs,

·         Les moyens des trois Sections radio équipant  chacune les trois PC Régimentaires,

·         Des balises NRTN6,

·        

Mon affectation comme OFF-Trans induit une charge de travail très importante, mais aussi une extraordinaire expérience professionnelle. Je peux dire que je « m’éclate » !

Entre-temps COMALAT décide de parfaire mes compétences dans le domaine des communications de l’aéronautique. Je rejoins l’ESAM de Bourges, où après quelques mois, j’obtiens le Brevet très rare et uniquement réservé aux Officiers de l’Arme du Matériel, d’Officier Mécanicien des équipements radioélectriques de l’aéronautique. J’ai exactement les mêmes compétences que mes camarades du « Matériel », comme le Lieutenant Oury, qui par la suite sera dans l’équipe d’inspection des matériels de l’ALAT.

Pendant ce temps, l’Etat-major de l’Armée de Terre mène une réflexion concernant  le soutien des matériels dans les forces, et imagine de regrouper, pour les équipements de transmission, le deuxième Échelon avec le troisième, sous la même autorité.

Je suis donc naturellement désigné pour prendre la responsabilité de la grande structure de soutien pour les moyens radioélectriques regroupant les deuxièmes et troisième Échelon sous mon autorité. Je suis Lieutenant, le plus ancien en grade.

Je m’éclate encore plus !

En 1977 j’ai le bonheur de recevoir, bien que tardive, ma troisième barrette. Mon Arme d’appartenance, les Transmissions, me fait déjà sentir son désamour du à mon infidélité!

Les chefs de Corps qui se succèdent à la barre du GALCA1, puis du 1°RHC, les Colonels Baffeleuf, puis Martini, n’hésitent pas à me charger de nombreuses responsabilités temporaires comme :

·         Le Commandement, durant deux mois,  de l’ESR, le Capitaine Dischino s’étant fracture la jambe,

·         Le remplacement du Chef des Services Techniques, durant trois mois, le titulaire s’absentant pour d’obscures raisons,

·         Le fréquent remplacement du Capitaine Trésorier, lors de ses permissions de longue durée,

·        

Ma deuxième moitié de séjours à Phalsbourg est marquée part mon « Temps de Commandement » à l’ECS, Escadrille de Commandement et des Services. Cette escadrille, très difficile à commander, à la « diversité structurelle très lourde », où de nombreux capitaines se sont usés, m’octroie généreusement de gigantesques embêtements, mais aussi des d’énormes satisfactions ! Je dois gérer, entre autres :

·         Les conflits permanents générés par l’emploi de mes 160 soldats dans les Services, SA, ST, SSIS, Opérations, Contrôle,…

·         Une section d’instruction commandée par des Aspirants de passage,

·         Le « KGB » étendu, composé d’une grande poignée de Sous-officiers Supérieurs usés par leur carrière et leurs excès,

·         Des matériels roulants fatigués,

·         Un magasin d’équipements et d’habillement gangréné par une « évaporation » de tradition…

Après plus de deux ans, je passe le Fanion de l’escadrille à mon successeur. Selon mon souhait, et peut être aussi en guise de récompense, COMALAT m’affecte au tout ressent 5°RHC de Pau.

 

1981- 1985 :

Me voilà à 36 ans, capitaine ancien, muté au 5°RHC de Pau, prestigieuse unité auréolée, ollé, de l’aura de la 11° DP. J’œuvre au sein du BOI comme :

·         Officier Mobilisation. Mon action, généralement incomprise, est cependant capitale puisqu’elle a pour objet de mettre en œuvre les moyens afin que le Régiment soit apte au combat à tout instant, et précisément après une alerte de type « Mistral ». En effet tous les personnels doivent être équipés individuellement et collectivement selon le fameux « Tableau de Dotation » du temps de paix ou du temps de guerre. Ils doivent être parfaitement instruits. Ils doivent être en parfaite condition sanitaire et morale. En fait, l’action de l’Officier Mobilisation est générique. C’est à partir de l’orientation déterminée par cet Officier que devrait s’articuler toutes celles concourant à la préparation au combat du niveau considéré, escadrille ou régiment. Mais bien entendu, la fonction de « Mobilisation », peu noble, est toujours reléguée à quelques préparatifs fugaces permettant d’éviter la mauvaise note de l’Inspecteur Général. Je reconnais, au cours de mes quatre années passées  sous l’Étendard du 5°, avoir énormément appris dans ce domaine, et être forcément un ardent défenseur de la fonction « Mobilisation ». Les Capitaines commandants d’escadrille doivent se souvenir de mes « coups de gueule » !

·         Officier des Plans et de l’Outre-mer, responsable des « Cellules Guépard »

·         Officier de Liaison auprès des différents PC des grandes Unités.

·         Officier Conseil, chef du BPSR,

·         Officier chargé du Budget,

·           Officier chargé des relations avec la FAMET et généralement avec l’Ejercito  espagnol,…

Je m’éclate !

Étant responsable de la préparation des Cellules Guépard, je ne peux faire moins que de me porter en tête de liste pour le départ au Tchad. Je me désigne donc pour être chef du détachement ALAT à Ati. Mon chef de corps du moment, le Colonel Batllo, ainsi que COMALAT approuvent mon volontariat.

Je débarque donc en ce mois de juillet 1984, sur le tarmac de l’aéroport international de N’Djamena, avec un double sentiment, celui nostalgique d’avoir laissé les miens pour plusieurs mois, et celui excité à l’idée de mener des raids aéromobiles dans les profondeurs désertiques au nord d’Ati.

Mais que nenni !

Le Colonel COMALAT qui accueille le tas de mecs sur le tarmac me signifie qu’il a décidé de m’affecter comme « Officier opérations » du détachement de l’ALAT à N’Djamena. Il décide de positionner mon copain Rondo comme Chef de Détachement ALAT à Ati, afin de le récompenser, dit’ il, de son obscur et besogneux labeur comme « Chef de Base » alors qu’il était lui-même Chef de Corps.

Je suis donc l’Officier opérations du Détachement ALAT de l’opération « MANTA ».

Je n’ai pas pu tirer la couverture à moi !

Je suis dépité !

Mais les jours passent, et mes liaisons sur Ati,  Moussoro et Abéche, me font changer de sentiment, et finalement je m’épanouis parfaitement à N’Djaména.

 

  1985- 1993 :

Avec mon grade de « Chef de Bataillon » je suis muté à Paris. Mon pédigrée « technico-opérationnel » a dégagé un profil d’emploi apte à servir à la DGA comme « Officier de Liaison Terre » auprès du Service Technique des Télécommunications de l’Aéronautique, STTE.

Cette année 1985, passé dans un Service inconsidéré des Constructions Aéronautiques, me pèse d’autant plus que je suis en doublure avec l’ancien Officier de Liaison qui joue les prolongations, avant son départ à la retraite,  dans un poste ouvert que pour une seule « solde à l’air ».

COMALAT Tousse. Moi j’ai la fièvre !

Afin de la calmer, en 1986 Villacoublay me propose deux postes plus intéressants, l’un comme Aide de Camp du Général commandant Le Service Technique de l’Armée de Terre, l’autre comme Officier de Liaison de L’ALAT à la DGA, Direction des Armements Terrestres à Saint Cloud. Le métier de porte-bidon du Général STAT, bien que réputé être à tremplin d’avancement, ne correspondant pas à mes aspirations. Je fais naturellement le choix du poste de Saint Cloud qui a pour objet :

·         Primordialement, de collaborer avec ses différents services, mais aussi avec les industriels, pour déterminer les solutions techniques pertinentes afin de satisfaire les besoins en effets opérationnels actuels et futurs de l’ALAT,

·         Essentiellement, selon le même processus, de collaborer à la recherche et au développement de maquettes fonctionnelles permettant de valider des équipements et systèmes de lutte contre la menace aéromobile.

·         Secondairement, désigné par la DGA/DAT, comme adjoint à l’ICETA chargé du développement du SIR ALAT, de suivre avec les industriels la définition des cahiers des charges et la réalisation de la première maquette fonctionnelle.

Sept années très denses et d’une très grande richesse passent top rapidement !

Ma collaboration a modestement contribué au développement d’équipements, de Systèmes et de Méta-systèmes dans les domaines :

·         Des Télécommunications,

·         De l’Optronique,

·         De l’Acoustique,

·         Des systèmes d’information et de Commandement.

Mais comme toujours, il y a un revers à la médaille. Je suis, plus que jamais, abandonné par mon Arme d’Origine, les Transmissions.

Merci Saint Gabriel !

 

1993- 1999:

 Au début de l’année, je change mon Képi contre un chapeau mou.

J’entame une activité d’Ingénieur Conseil au sein d’une petite société  d’ingénierie où je fonctionne comme expert en sous-traitance de la DGA, DCAé, DAT et DCN.

 

2000 :

Mes activités professionnelles cessent totalement.

Je quitte la région parisienne, et coiffé du béret catalan ceignant mon crane dégarni barcelonais, je rejoins le Béarn dans le but de manger mes temps libres à la sauce du même nom !

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6 mars 2010 6 06 /03 /mars /2010 10:48

Toute ressemblance avec un personnage connu est purement réelle et n’est pas une coïncidence engendré par une imagination fertile.

 

 1945 :

1° janvier, en France, la Wehrmacht  , lance l'Opération Nordwind dans le nord de l'Alsace et de la Lorraine.

27 janvier, la bataille des Ardennes finit officiellement.

7 mars, franchissement du Rhin par les Alliés à Remagen et entrée des troupes américaines en Allemagne.

29 avril-13 mai, en France les Femmes votent pour la première fois à l’occasion des élections municipales.

Au printemps, en Espagne, la résistance au franquisme est signalée dans plusieurs provinces.

7 mai, l'Allemagne se rend sans conditions aux Alliés à Reims. Cette reddition est signée par les Généraux allemand Alfred Jodl,   soviétique Ivan Susloparo, français François Sevez, et en présence de l’américain Bedel-Smith.

6 août 1945, en Espagne, première action d'une longue série attribuée aux anarchistes.

Ce jour-là, six individus armés attaquent une succursale du "Banco de Vizcaya" à Barcelone. Suite à ces opérations, plusieurs militants libertaires sont arrêtés. Jaime Parés, surnommé "Abisino" meurt, le corps criblé de balles par la police. Il était l'un des premiers compagnons de Sabaté.

A Barcelone le 25 septembre, naissance de José Romero Martinez y Martinez dans le « quartier chinois ». Les archives de l’époque ayant été détruites dans un incendie anarchiste, il n’est pas possible de produire une photographie de Don José dans le plus simple appareil. De plus, l’objectif de cet article, n’est pas de montrer l’appareil de José dans sa tenue de nouveau-né non emmailloté !

 1945 :

En Espagne, les groupes anarchistes réapparaissent. La fin du fascisme et du nazisme en Europe permettait de croire à la fin de leurs alliés, le franquisme. La finalité de l’action anarchiste est clairement propagandiste. Leur objectif est de réorganiser la CNT de l'intérieur et de lui donner des moyens financiers. Durant cette période, plusieurs comités nationaux ou régionaux de la CNT se reconstituent, mais ils sont dissous après quelques mois. De nombreux membres de ces comités sont emprisonnés et exécutés. Le groupe ayant à sa tête Marcelino Massana compte en son sein, les frères Francisco dit "El Quico" et José Sabaté, Facerias dit "Face" et Ramon Vila dit "Caraquemada". Ces groupes agissent sous les noms de M.L.E, Mouvement Libertaire en Exil. Sporadiquement des tracts sont diffusés, signés du sigle F.I.J.L, Fédération Ibérique des Jeunesses Libertaires.

1946 :

20 janvier, le Président intérimaire Harry Truman fonde le Central Intelligence Group qui deviendra la CIA.

21 février en Espagne, exécution de 14 opposants au régime franquiste. Ces exécutions créent une vive émotion internationale. Le gouvernement français décide de fermer la frontière à partir du 1er mars.

4 mars, les États-Unis, la France et le Royaume-Uni lancent un appel aux Espagnols en faveur du renversement du régime franquiste.

5 mars, Discours de Winston Churchill à Fulton dans le Missouri, en présence du président Harry Truman, sur le thème du « rideau de fer ».

« De Stettin sur la Baltique à Trieste sur l'Adriatique, un rideau de fer s'est abattu sur le continent (...) ». Churchill n'a plus aucune fonction gouvernementale mais il veut mettre en garde les pays occidentaux et leurs opinions publiques contre le danger de l'avancée communiste en Europe. Celle-ci met en péril la liberté et la démocratie chèrement acquises et récemment retrouvées. Ce discours peut être considéré comme l'acte fondateur qui va conduire, après le coup de Prague de 1948, à la création du pacte militaire de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord, le 4 avril 1949.

25 mai, mort du tueur en série français Marcel Petiot.

22 juillet, signature à New York par les représentants de 60 pays de la charte de l’OMS, Organisation Mondiale de la Santé.

23 octobre, l'assemblée générale des Nations Unies se réunit pour la première fois.

11 décembre, les Nations Unies créent L'UNICEF.

12 décembre, l’ONU condamne le gouvernement franquiste et recommande le rappel des ambassadeurs.

 1947-1952 :

En Espagne, déclin des actions de résistance libertaire. Il est dû à l’intense répression franquiste et à l'abandon de la lutte armée par d'importants groupes d'opposition espagnole, et en particulier du Parti Communiste Espagnol, PCE.

 1948 :

Fin décembre, ma famille se réfugie en France, après avoir clandestinement traversé à pied les Pyrénées dans des conditions particulièrement difficiles. Cette traversée est relatée dans l’ouvrage intitulé « Sentier » que j’ai écris récemment.

 1949 :

J’ai trois ans et une poignée de mois, ma famille s’établit à Saint Girons dans l’Ariège.

Mon père, Juan Romero Martinez, reprend clandestinement ses activités politico-syndicales au sein de la cellule anarchiste de la CNT espagnole de Saint Girons, Sous-préfecture de l’Ariège.

 1950- 1966 :

 

Dans un premier temps, ma famille est logée chez la sœur aînée de mon père, Madame Mitcha, à la rue des « Jacobins », au dessus de la boulangerie qui faisait face à la boutique de primeurs. Après quelque temps et quelques tensions, mes parents décident de s’installer à la rue de « Ville franche ». Nous sommes voisins de palier d’un couple dont le chef de famille est « Gendarme » à la caserne de Saint Girons. Nous sommes dans un tel dénuement que cette famille nous prête un peu de mobilier.

Finalement nous nous installons au 48 rue Saint-Vallier tout près de l’église du même nom. Au plan politique, mon père étant en désaccord avec les positions de la CNT locale, frôle l’assassinat[7] et est banni du parti.

Entre temps, je fréquente par obligation, l’école maternelle du Quai du Roc, près de la Poste, où mes fugues sont fréquentes. Puis, après une scolarité incertaine au « Petit Collège » de la rue des Jacobins, où je subis les sévices de Monsieur Delqué, je me retrouve, après quelques péripéties estudiantines, en classe du Certificat d’études de  Monsieur Rivière. Cet homme était un vrai Monsieur de l’enseignement ! C’est grâce à sa pédagogie novatrice, à sa patience, à l’amour de son métier, que je me suis ouvert pleinement à mes études. Auparavant, elles m’écartelaient. Mon excellente scolarité me permet d’obtenir « haut la main », mon Certificat d’Etudes Primaires. Répondant aux attentes de Monsieur Rivière je m’oriente naturellement vers un lycée. Ainsi, j’obtiens un Baccalauréat Technique, après un passage de trois ans au Lycée Technique d’Albi.

Ma famille qui s’était installée à Narbonne, part s’établir à Toulouse.

Enfin, j’entame des études supérieures à la faculté des Sciences Paul Sabatier à Toulouse. J’étais un étudiant peu fortuné et afin de réduire la charge que je faisais subir à mes parents, j’étais simultanément employé à mi-temps chez un réparateur de machines à écrire. Mes études s’en trouvent naturellement affectées. En 1965-1966, l’Université n’offre pas les moyens matériels et pédagogiques que l’on trouve actuellement partout en France.

 

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3 février 2010 3 03 /02 /février /2010 15:06

La naissance est prévue, pour ne pas dire programmée le 25 septembre 1945, à Barcelone, en plein quartier chinois, au 12 de la « Calle del Medio Dia».

 

Le jour amorce son agonie dans des teintes mauves aux senteurs de méditerranée et aux effluves de marée. Le bruit de la ville, s’insinue à travers les fenêtres grandes ouvertes, comme un son obsédant de radio mal réglée. Il se mêle au tintement à peine audible des cloches de la messe du soir appelant les fidèles à l’être davantage à leur paroisse. La journée a été assez chaude et les journaliers du port sont rentrés chez eux, après le passage traditionnel à la « taberna 1 ».

 

Dans l'atmosphère moite de ce début de soirée, Soledad 2 accapare l'attention des quelques membres de la famille. Quelques uns participent aux soins de celle qui allait donner la vie pour la deuxième fois. D’autres sont simplement présents rendant l’atmosphère de la pièce un peu moins respirable

 

La sage femme au visage envahi par la transpiration et marqué par le stress de ses multiples délivrances, ordonne et exige. Elle obtient rapidement l’eau chaude et de linge nécessaires à l’enfantement. Sur son front luisant, une mèche rebelle lui confère une pointe de Napoléon. Sa petite moustache duveteuse lui donne une teinte masculine. Elle exerce une autorité tyrannique indiscutable sur l'assemblée captivée par ses mains dextres et velues. Elle montre ses capacités de magicienne en faisant sortir un latin. Son corps empâté et ballonné par les excès de charcuterie et de « porron »3 , limite ses mouvements. Elle décide de se mettre en position face à la parturiente, et semi accroupie, en position de gardien de but, attend anxieusement l'éclatement de la vie annoncée par les dernières contractions.

 

Le lit est astucieusement placé au centre de la chambre, à l’aplomb de la lampe du plafond. Il permet ainsi le déplacement, tout autour, et un éclairement conforme au besoin de la praticienne. Maman est livide et épuisée par ce terrible, mais noble, combat de la nature. Son beau visage de madone légèrement potelé est en partie masqué par quelque mèche de cheveux collés par la sueur. Elle halète essayant vainement de calmer sa respiration perturbée par les douleurs intenses. Elle sait qu’elle va bientôt allaiter.

 

Papa, a la beauté virile du catalan, fort comme un athlète aux vingt trois ans insolents ne sait comment alléger la souffrance de sa femme. Il va d'un côte à l'autre de la couche comme un voilier tirant des bords face au vent. Il tangue sur sa deuxième paternité imminente, mais quel Capitaine !

 

La tension de la délivrance proche semble augmenter la moiteur ambiante. Les draps, de toile rugueuse, sont imbibés de transpiration. L’attente dans cette ambiance de salle d'attente use la patience.

 

La nuit envahie rapidement la ville et s'infiltre sournoisement à l'intérieur de l'appartement appartenant à la "Yaya 4" Barbara. La clarté du jour se retire mollement laissant à regret le champ libre à sa rivale, la belle Nuit. Les objets perdent leur contour et leur couleur. Les visages hâlés par le soleil méditerranéen perdent progressivement leur teint bronze et virent au gris. Les traits des visages s’estompent cachant les sentiments et les regards. C’est le moment où seule l’intonation de la voix trahit les sentiments et la pensée.

 

Le travail de la parturiente arrive à son terme. Dans ce début d’obscurité, la sage-femme descend la lampe du plafond. Elle oriente l’abat-jour pour éclairer la scène d’un geste de réflexe professionnel. Dans sa vie d’accoucheuse, la docte femme a éclairé bien des champs de naissance, elle qui connaît les effets de la pine.

 

- Pousse Soledad, pousse ! S’énerve l’accoucheuse avec l’intonation d’un gardien de but sur le point de recevoir un tir de penalty.

 

Maman est épuisée par la douleur et les efforts prolongés. La venue à la vie s’effectue bizarrement dans la souffrance, alors que la procréation est faite dans la jouissance. L’assemblée, constituée en délégation parentale, semble méditer cette réflexion tant ses membres semblent immergés dans la profondeur de cette révélation philosophique.

 

Un halo de lumière jaune d’œuf éclaire une partie du lit. Encore un effort. La tête du bébé apparaît en laissant voir, déjà, une calvitie prémonitoire. Maman sait qu’elle doit effectuer les derniers efforts pour exclure une part de soi et être finalement soulagée de cette petite agonie.

 

Soledad pousse de son mieux. Les douleurs de dilatation sont insupportables. Encore quelques contractions. Son corps obéit à la loi de la nature et, peu à peu, expulse le bébé. Elle chasse bruyamment sa respiration à plusieurs reprises pour aider la sage-femme à extraire le tout petit.

 

Le dernier effort est ponctué d’un long cri de soulagement et d’épuisement.

 

Le quart de 21 heures vient de sonner à l’église, au croisement de la rue Sant Francesc et de la rue d’en Rull.

 

Après la tête et le torse, le bassin est passé. Fille ou garçon ?

 

- «¡ Es un Niño 5 ! » claironne joyeusement l’accoucheuse dans un style de commentateur sportif.

 

Me voilà ! Je plonge dans la vie revêtu de ma seule innocence qui ne me tient pas chaud. Je me présente donc à la vie, en tenue d'Aden, mais sans la pomme, vu que j’allais la croquer 23 ans plus tard.

 

Un chant flamenco syncopé, chargé autant de tristesse que d’alcool monte jusqu’à la fenêtre saluant la venue au monde de l’enfant, symbole du renouvellement de l’humanité.

 

Aveuglé par la lumière de la lampe, les yeux légèrement ouverts, je plisse les paupières. Ce froncement et mon teint de nouveau-né m’attribuent un petit air 1946nippon fripon. La logique est maintenue, ma naissance ayant lieu dans le Quartier Chinois. La vie m’agresse les sens dans cette explosion d’odeurs et de sons.

 

Fierté de mon Père.

 

Sa virilité n’est pas à démontrer. Peut être a-t-il un léger regret de ne pas avoir de fille. Par la suite il le démontrera sa volonté de paterner une petite fille, car il ne s’arrêtera de procréer qu’au cinquième round, l’avant dernier enfant sera finalement « la fille ».

 

Maman s’est assoupie et se désintéresse de l’assistance. Elle a bien effectué son devoir d’épouse et de mère selon les critères de la société. Le reste de la famille commente abondamment l’exploit comme le font les dingues du football, après un grand match. Les hommes fument, merci pour les bronches du nouveau né. Les femmes s’activent à effacer les traces du combat sanglant qui vient de se dérouler dans l’arène de la mise à vie.

 

Vive la vie ! Elle a gagné la bataille. La délivrance est parfois cruelle car elle gomme la vie du bébé, de la maman voire les deux en même temps.

 

L'ampoule, pauvre mais digne comme un ecclésiastique chauve, éclaire encore chichement de ses quelques bougies la scène de la nativité. En effet la date symbolique du 25 septembre rappelé un autre événement. C'est dans un recueillement pastoral, que les nouveaux parents redoublants, décident d'appeler leur nouveau-né José. Si José est un prénom qui a la particularité d'être un nom propre très commun en Ibérie, il n'en demeure pas moins qu'il a une valeur chrétienne hautement symbolique. Le consensus d'appellation m’identifiant, résulte d'une réflexion familiale et stratégique initialisée neuf mois auparavant. Mon Grand père maternel 7, mort sur le front de l’Ebre s’appelait José ! Honneur à ce brave homme, engagé volontaire par obligation dans les rangs républicains, et qui a trépassé en 1937, décapité par un obus alors qu’il satisfaisant un besoin naturel.

 

De mes yeux entrouverts, bruns et espiègles, je regarde goguenard l'entourage s'extasiant hypocritement de ma beauté. Je suis dans ce monde étrange ou les sons la lumière et les odeurs m’envahissent les sens. Ma respiration est rapide. Je baigne dans l'air chargé de fumée de tabac bon marché, de senteurs épicées de cuisine, et de sueur. Malheur, je ne suis plus dans le liquide amniotique berceur et protecteur. J'aspire à une bonne tétée et à une petite sieste sur le sein de ma génitrice.

 

Après avoir vidé mon premier nichon maternel, je fais mine de m’assoupir sur la poitrine nourricière, ignorant le reste du monde. La sage femme ne voit pas les choses de cette façon. Elle entreprend de me passer au bain et commence par mon bassin lequel est méditerranéen. Ma tante Teresa l’assiste, elle qui n'a ni le physique ni le charisme de la mère du même nom. Malmené dans l'eau tiède de la cuvette d'émail ébréchée, j'y laisse les miasmes de ma naissance en attendant que l’on me drape dans mon rôle de nouveau-né.

 

Propre et emmailloté 8 , je suis abandonné à la manipulation de la famille extasiée et émerveillée par le magnifique spectacle de ma venue dans cette existence. Je passe de bras en bras et de mains en main féminines pour recevoir les câlins de bienvenue. Les hommes conscients de leur virilité grégaire, se contentent d’acquiescer de leur chef tout en ajustant leur boïna toujours récalcitrante.

 

Au fond de la pièce, près de la fenêtre ouverte est assis le grand-père Ramon 10 . Il regarde la rue en contrebas, le mégot aux lèvres. Son intérêt est nettement marqué par la vue de la taberna au bout de la rue, lieu où se concentre toute la lie du port comme dans un fond de carafe. Son nouveau petit-fils ne semble pas remuer en lui une quelconque fibre familiale. Son foie est sans doute suffisamment fibreux.

 

La cinquantaine, grand, brun, les cheveux soigneusement peignés en arrière et brillantinés, il joue à la perfection son rôle de maître de clan. Il condescend, peu souvent, à donner un avis vital sur quelque sujet insignifiant, confirmant ce trait de caractère latin très répandu sur le contour du bassin méditerranéen. Le Papy a de la bouteille et il ne s'en prive pas pour en siroter quelques-unes, ce qui la plupart du temps le rend colérique après épuisement de son stock.

 

Nul ne peut préciser son activité professionnelle, celle-ci étant sans doute constituée d’une série de petites actions semi clandestines et légalement assez douteuses, menées dans l’environnement du port où les marins américains côtoient les revendeurs à la sauvette et les praticiennes de la bitte d’amarrage. Il parvient, cependant, à nourrir sa famille à défaut de nourrir une quelconque ambition pour sa femme, et pour sa dernière fille 11 de dix ans, encore à sa charge.

 

Le jour s’est finalement retiré avec la marée du soir.

 

Les lumières de la ville s’efforcent d’éclairer les zones troubles du quartier sans y parvenir totalement. Cette semi pénombre favorise une vie nocturne particulièrement exubérante. La Rue, assez agitée dans la journée, laisse transpirer une sensation étrange et subtile. Il y a de l’excitation à patauger dans les interdits moraux du port proche où le pécheur, suintants ses désirs par tous les pores de sa peau, assouvit ses penchants en commettant ses péchés 12.

 

Presque 22H.

 

La taberna est bondée depuis longtemps. Quelques consommateurs, accompagné de marins américains, éméchés et marinant dans leur tenue blanche, entonnent un chant flamenco braillard et discordant. Leur voix assez empâtée indique un coma éthylique consciencieusement préparé. C’est qu’il y a de l’honneur, pour ces baroudeurs de la barre, à conserver une alcoolémie stabilisée en permanence à quelques 2 grammes. L’accès à la taverne est tacitement interdit aux femmes par les critères moraux du moment. Les quelques rares dames présentes maintiennent une tradition portuaire millénaire permettant, à grand nombre de marins du monde, d’avoir une mariée dans chaque mouillage.

 

La Rue du quartier Chinois est, bien entendu, la zone de tous les trafics, petits ou grands. On y rencontre, la « Mama », faisant semblant de tapiner mais qui en réalité vends ses doses de drogue qu’elle cache habilement dans son chignon. Il y a aussi les quelques petits trafiquants et revendeurs de cigarettes, et de produits divers allant du blouson américain volé à un marin en vadrouille et saoul, aux fruits et légumes chapardés sur le site de déchargement des docks. La Rue du Quartier Chinois n’est que le théâtre de la vie où l’humanité se révèle à nu exhibant ses tendances bestiales.

 

Je suis donc né, ainsi que mon frère aîné, Ramon, dans l’entre du démon où nous ne pouvions devenir que de bons petits diables.

 

*         *

*

 

 

1 Débit de vin où le client buvait sur place. Bar ancien.

2 Soledad, Solitude. Les prénoms catalans sont comme la région, noyés par le catholicisme.

3 Le « porron » est un récipient en verre à deux verseurs, l’un évasé permettant son remplissage de vin, l’autre effilé permettant de boire en versant un filet de liquide directement dans la bouche. C’est objet est le pendant de la « bota », celle-ci est en peau.

4 Grand-mère en catalan

5 Petit garçon

6 La « bougie » était une unité de mesure populaire.

7 Contremaître aux Docs, et contre la violence, ne prenant pas parti, le Parti le contraint à partir volontaire forcé combattre « Los Moros » sur le front de l’Ebre.

8 Il était courent d’emmailloter les bébés dans un grand linge qui enserrait sa taille et ses jambes.

9 Béret noir catalan porté tiré en arrière façon « Tché » ou tiré sur le côté façon « commando ».

10 Père de mon Père.

11 Ma tente Paquita, sœur de mon Père.

12 Notez le rythme de la phrase. L’auteur promène nos pas prudes dans les passages putrides de nos passions (NDLR

 

*        *

*

Dans le cas où ce texte ne vous aurait pas laissé indifférent, je suis en mesure d'en produire d'autres dans le même style.

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3 février 2010 3 03 /02 /février /2010 15:04

La naissance est prévue, pour ne pas dire programmée le 25 septembre 1945, à Barcelone, en plein quartier chinois, au 12 de la « Calle del Medio Dia».

 

Le jour amorce son agonie dans des teintes mauves aux senteurs de méditerranée et aux effluves de marée. Le bruit de la ville, s’insinue à travers les fenêtres grandes ouvertes, comme un son obsédant de radio mal réglée. Il se mêle au tintement à peine audible des cloches de la messe du soir appelant les fidèles à l’être davantage à leur paroisse. La journée a été assez chaude et les journaliers du port sont rentrés chez eux, après le passage traditionnel à la « taberna».

 

Dans l'atmosphère moite de ce début de soirée, Maman accapare l'attention des quelques membres de la famille. Quelques uns participent aux soins de celle qui allait donner la vie pour la deuxième fois. D’autres sont simplement présents rendant l’atmosphère de la pièce un peu moins respirable

 

La sage femme au visage envahi par la transpiration et marqué par le stress de ses multiples délivrances, ordonne et exige. Elle obtient rapidement l’eau chaude et de linge nécessaires à l’enfantement. Sur son front luisant, une mèche rebelle lui confère une pointe de Napoléon. Sa petite moustache duveteuse lui donne une teinte masculine. Elle exerce une autorité tyrannique indiscutable sur l'assemblée captivée par ses mains dextres et velues. Elle montre ses capacités de magicienne en faisant sortir un latin. Son corps empâté et ballonné par les excès de charcuterie et de « porron », limite ses mouvements. Elle décide de se mettre en position face à la parturiente, et semi accroupie, en position de gardien de but, attend anxieusement l'éclatement de la vie annoncée par les dernières contractions.

 

Le lit est astucieusement placé au centre de la chambre, à l’aplomb de la lampe du plafond. Il permet ainsi le déplacement, tout autour, et un éclairement conforme au besoin de la praticienne. Maman est livide et épuisée par ce terrible, mais noble, combat de la nature. Son beau visage de madone légèrement potelé est en partie masqué par quelque mèche de cheveux collés par la sueur. Elle halète essayant vainement de calmer sa respiration perturbée par les douleurs intenses. Elle sait qu’elle va bientôt allaiter.

 

Papa, a la beauté virile du catalan, fort comme un athlète aux vingt trois ans insolents ne sait comment alléger la souffrance de sa femme. Il va d'un côte à l'autre de la couche comme un voilier tirant des bords face au vent. Il tangue sur sa deuxième paternité imminente, mais quel Capitaine !

 

La tension de la délivrance proche semble augmenter la moiteur ambiante. Les draps, de toile rugueuse, sont imbibés de transpiration. L’attente dans cette ambiance de salle d'attente use la patience.

 

La nuit envahie rapidement la ville et s'infiltre sournoisement à l'intérieur de l'appartement appartenant à la "Yaya" Barbara. La clarté du jour se retire mollement laissant à regret le champ libre à sa rivale, la belle Nuit. Les objets perdent leur contour et leur couleur. Les visages hâlés par le soleil méditerranéen perdent progressivement leur teint bronze et virent au gris. Les traits des visages s’estompent cachant les sentiments et les regards. C’est le moment où seule l’intonation de la voix trahit les sentiments et la pensée.

 

Le travail de la parturiente arrive à son terme. Dans ce début d’obscurité, la sage-femme descend la lampe du plafond. Elle oriente l’abat-jour pour éclairer la scène d’un geste de réflexe professionnel. Dans sa vie d’accoucheuse, la docte femme a éclairé bien des champs de naissance, elle qui connaît les effets de la pine.

 

- Pousse Soledad, pousse ! S’énerve l’accoucheuse avec l’intonation d’un gardien de but sur le point de recevoir un tir de penalty.

 

Maman est épuisée par la douleur et les efforts prolongés. La venue à la vie s’effectue bizarrement dans la souffrance, alors que la procréation est faite dans la jouissance. L’assemblée, constituée en délégation parentale, semble méditer cette réflexion tant ses membres semblent immergés dans la profondeur de cette révélation philosophique.

 

Un halo de lumière jaune d’œuf éclaire une partie du lit. Encore un effort. La tête du bébé apparaît en laissant voir, déjà, une calvitie prémonitoire. Maman sait qu’elle doit effectuer les derniers efforts pour exclure une part de soi et être finalement soulagée de cette petite agonie.

 

Soledad pousse de son mieux. Les douleurs de dilatation sont insupportables. Encore quelques contractions. Son corps obéit à la loi de la nature et, peu à peu, expulse le bébé. Elle chasse bruyamment sa respiration à plusieurs reprises pour aider la sage-femme à extraire le tout petit.

 

Le dernier effort est ponctué d’un long cri de soulagement et d’épuisement.

 

Le quart de 21 heures vient de sonner à l’église, au croisement de la rue Sant Francesc et de la rue d’en Rull.

 

Après la tête et le torse, le bassin est passé. Fille ou garçon ?

 

- «¡ Es un Niño ! » claironne joyeusement l’accoucheuse dans un style de commentateur sportif.

 

Me voilà ! Je plonge dans la vie revêtu de ma seule innocence qui ne me tient pas chaud. Je me présente donc à la vie, en tenue d'Aden, mais sans la pomme, vu que j’allais la croquer 23 ans plus tard.

 

Un chant flamenco syncopé, chargé autant de tristesse que d’alcool monte jusqu’à la fenêtre saluant la venue au monde de l’enfant, symbole du renouvellement de l’humanité.

 

Aveuglé par la lumière de la lampe, les yeux légèrement ouverts, je plisse les paupières. Ce froncement et mon teint de nouveau-né m’attribuent un petit air nippon fripon. La logique est maintenue, ma naissance ayant lieu dans le Quartier Chinois. La vie m’agresse les sens dans cette explosion d’odeurs et de sons.

 

Fierté de mon Père.

 

Sa virilité n’est pas à démontrer. Peut être a-t-il un léger regret de ne pas avoir de fille. Par la suite il le démontrera sa volonté de paterner une petite fille, car il ne s’arrêtera de procréer qu’au cinquième round, l’avant dernier enfant sera finalement « la fille ».

 

Maman s’est assoupie et se désintéresse de l’assistance. Elle a bien effectué son devoir d’épouse et de mère selon les critères de la société. Le reste de la famille commente abondamment l’exploit comme le font les dingues du football, après un grand match. Les hommes fument, merci pour les bronches du nouveau né. Les femmes s’activent à effacer les traces du combat sanglant qui vient de se dérouler dans l’arène de la mise à vie.

 

Vive la vie ! Elle a gagné la bataille. La délivrance est parfois cruelle car elle gomme la vie du bébé, de la maman voire les deux en même temps.

 

L'ampoule, pauvre mais digne comme un ecclésiastique chauve, éclaire encore chichement de ses quelques bougies la scène de la nativité. En effet la date symbolique du 25 septembre rappelé un autre événement. C'est dans un recueillement pastoral, que les nouveaux parents redoublants, décident d'appeler leur nouveau-né José. Si José est un prénom qui a la particularité d'être un nom propre très commun en Ibérie, il n'en demeure pas moins qu'il a une valeur chrétienne hautement symbolique. Le consensus d'appellation m’identifiant, résulte d'une réflexion familiale et stratégique initialisée neuf mois auparavant. Mon Grand père maternel, mort sur le front de l’Ebre s’appelait José ! Honneur à ce brave homme, engagé volontaire par obligation dans les rangs républicains, et qui a trépassé en 1937, décapité par un obus alors qu’il satisfaisant un besoin naturel.

 

De mes yeux entrouverts, bruns et espiègles, je regarde goguenard l'entourage s'extasiant hypocritement de ma beauté. Je suis dans ce monde étrange ou les sons la lumière et les odeurs m’envahissent les sens. Ma respiration est rapide. Je baigne dans l'air chargé de fumée de tabac bon marché, de senteurs épicées de cuisine, et de sueur. Malheur, je ne suis plus dans le liquide amniotique berceur et protecteur. J'aspire à une bonne tétée et à une petite sieste sur le sein de ma génitrice.

 

Après avoir vidé mon premier nichon maternel, je fais mine de m’assoupir sur la poitrine nourricière, ignorant le reste du monde. La sage femme ne voit pas les choses de cette façon. Elle entreprend de me passer au bain et commence par mon bassin lequel est méditerranéen. Ma tante Teresa l’assiste, elle qui n'a ni le physique ni le charisme de la mère du même nom. Malmené dans l'eau tiède de la cuvette d'émail ébréchée, j'y laisse les miasmes de ma naissance en attendant que l’on me drape dans mon rôle de nouveau-né.

 

Propre et emmailloté, je suis abandonné à la manipulation de la famille extasiée et émerveillée par le magnifique spectacle de ma venue dans cette existence. Je passe de bras en bras et de mains en main féminines pour recevoir les câlins de bienvenue. Les hommes conscients de leur virilité grégaire, se contentent d’acquiescer de leur chef tout en ajustant leur boïna toujours récalcitrante.

 

Au fond de la pièce, près de la fenêtre ouverte est assis le grand-père Ramon. Il regarde la rue en contrebas, le mégot aux lèvres. Son intérêt est nettement marqué par la vue de la taberna au bout de la rue, lieu où se concentre toute la lie du port comme dans un fond de carafe. Son nouveau petit-fils ne semble pas remuer en lui une quelconque fibre familiale. Son foie est sans doute suffisamment fibreux.

 

La cinquantaine, grand, brun, les cheveux soigneusement peignés en arrière et brillantinés, il joue à la perfection son rôle de maître de clan. Il condescend, peu souvent, à donner un avis vital sur quelque sujet insignifiant, confirmant ce trait de caractère latin très répandu sur le contour du bassin méditerranéen. Le Papy a de la bouteille et il ne s'en prive pas pour en siroter quelques-unes, ce qui la plupart du temps le rend colérique après épuisement de son stock.

 

Nul ne peut préciser son activité professionnelle, celle-ci étant sans doute constituée d’une série de petites actions semi clandestines et légalement assez douteuses, menées dans l’environnement du port où les marins américains côtoient les revendeurs à la sauvette et les praticiennes de la bitte d’amarrage. Il parvient, cependant, à nourrir sa famille à défaut de nourrir une quelconque ambition pour sa femme, et pour sa dernière fille de dix ans, encore à sa charge.

 

Le jour s’est finalement retiré avec la marée du soir.

 

Les lumières de la ville s’efforcent d’éclairer les zones troubles du quartier sans y parvenir totalement. Cette semi pénombre favorise une vie nocturne particulièrement exubérante. La Rue, assez agitée dans la journée, laisse transpirer une sensation étrange et subtile. Il y a de l’excitation à patauger dans les interdits moraux du port proche où le pécheur, suintants ses désirs par tous les pores de sa peau, assouvit ses penchants en commettant ses péchés.

 

Presque 22H.

 

La taberna est bondée depuis longtemps. Quelques consommateurs, accompagné de marins américains, éméchés et marinant dans leur tenue blanche, entonnent un chant flamenco braillard et discordant. Leur voix assez empâtée indique un coma éthylique consciencieusement préparé. C’est qu’il y a de l’honneur, pour ces baroudeurs de la barre, à conserver une alcoolémie stabilisée en permanence à quelques 2 grammes. L’accès à la taverne est tacitement interdit aux femmes par les critères moraux du moment. Les quelques rares dames présentes maintiennent une tradition portuaire millénaire permettant, à grand nombre de marins du monde, d’avoir une mariée dans chaque mouillage.

 

La Rue du quartier Chinois est, bien entendu, la zone de tous les trafics, petits ou grands. On y rencontre, la « Mama », faisant semblant de tapiner mais qui en réalité vends ses doses de drogue qu’elle cache habilement dans son chignon. Il y a aussi les quelques petits trafiquants et revendeurs de cigarettes, et de produits divers allant du blouson américain volé à un marin en vadrouille et saoul, aux fruits et légumes chapardés sur le site de déchargement des docks. La Rue du Quartier Chinois n’est que le théâtre de la vie où l’humanité se révèle à nu exhibant ses tendances bestiales.

 

Je suis donc né, ainsi que mon frère aîné, Ramon, dans l’entre du démon où nous ne pouvions devenir que de bons petits diables.

Débit de vin où le client buvait sur place. Bar ancien.

Soledad, Solitude. Les prénoms catalans sont comme la région, noyés par le catholicisme.

Le « porron » est un récipient en verre à deux verseurs, l’un évasé permettant son remplissage de vin, l’autre effilé permettant de boire en versant un filet de liquide directement dans la bouche. C’est objet est le pendant de la « bota », celle-ci est en peau.

Grand-mère en catalan

Petit garçon

La « bougie » était une unité de mesure populaire.

Contremaître aux Docs, et contre la violence, ne prenant pas parti, le Parti le contraint à partir volontaire forcé combattre « Los Moros » sur le front de l’Ebre.

Il était courent d’emmailloter les bébés dans un grand linge qui enserrait sa taille et ses jambes.

Béret noir catalan porté tiré en arrière façon « Tché » ou tiré sur le côté façon « commando ».

Père de mon Père.

Ma tente Paquita, sœur de mon Père.

Notez le rythme de la phrase. L’auteur promène nos pas prudes dans les passages putrides de nos passions (NDLR)

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